La (re)naissance du manga

De la fin de la 2ème guerre mondiale à nos jours

Osamu Tezuka : Naissance de nouveaux codes

Une véritable rupture va s’opèrer dans le manga de l’après guerre. Peut-être pourrait-on même considérer que c’est vraiment à ce moment là qu’on entre dans un genre aux codes fortement marqués : disons le manga moderne, au plus près de celui que nous connaissons. L’un de ceux qui poussera cette nouvelle porte a été reconnu et souvent nommé, à juste titre, comme le Dieu du Manga. Il s’agit de Osamu Tezuka. Là encore, en matière d’influences culturelles, les codes et les références dont s’inspireront le manga sont sous le signe de l’ouverture. Dans le Japon brisé de l’après-guerre, mais déjà avide de reconstruction et d’ouverture sur le monde, le manga se préparera déjà à hériter des influences à la fois du cinéma et des premiers dessins animés venant de l’Ouest : sur la dimension visuelle, les grands yeux notamment, Disney comptera pour beaucoup chez Osamu Tezuka, mais pas seulement.

L’influence du storyboarding et du cinéma

Destiné à être médecin, le futur Mangaka, déjà doté d’un grand talent pour le dessin et les histoires, possède une sensibilité et un esprit d’observation qui lui permet de tout absorber et distiller. Une fois lancé complètement dans l’Art du manga, pas un thème ne lui résistera. Pas un qu’il n’ait abordé. Scénario, dessin, mise en scène, Osamu Tezuka est sur tous les fronts. Pas un code du cinéma qu’il n’ait repris, tordu, adapté pour le remettre au goût de ses créations : conventions narratives, effets visuels, gros plans et émotions, caméos et apparitions à la Hitchcock dans ses propres BD, personnages qui reviennent d’un album à l’autre, et qui peuvent même un peu comme des acteurs, venus incarner des personnages divers.

Le manga est né. Le public l’adore. Il sera bientôt insatiable. Les mangakas deviennent les ambassadeurs de ce nouvel art devenu japonais jusqu’au bout des ongles et qui partira bientôt, à son tour, à la conquête de l’Ouest. Avec lui, la sensibilité japonaise tout entière se donnera à lire au monde. Bientôt le manga surgira aussi du papier pour partir à la conquête des écrans. Il se déclinera même en d’infinies possibilités merchandising pour envahir la pop culture.

L’arrivée sur le sol français

Sous forme papier, le manga touche les côtes françaises dans le courant des années 70. Pourtant, pour qu’il connaisse un succès plus proche de la culture de masse, il faut attendre la fin des 70 et le début de 80. C’est par la télévision qu’il percutera alors les jeunes générations françaises des années 80-90. Dans les émissions pour enfants de l’après-midi, on commencera à découvrir des dessins animés d’un nouveau genre : robots géants aux super-pouvoirs (Goldorak), princes de l’espace pris dans des combats inter-galactiques sans fin (Albator, Ulysse 31,…), explosions d’effets spéciaux. Pendant que Hollywood commence à raconter sa propre guerre des étoiles et pousse toujours plus loin le mythe de ses super-héros, le japon se fabrique les siens et les diffusent à sa manière. Le manga a débarqué en France par la grande porte, celle de la télévision. Il y demeurera pour longtemps. Il ne se limite pas d’ailleurs qu’aux séquences de combats et les filles ne sont pas oubliées avec le monde onirique, rose et pleine d’émotion de la jeune Candy et ses yeux immenses qui brillent ou se remplissent de larmes en fonction de ses mésaventures. “On s’amuse, on pleure, on rit, il y a des méchants et des gentils”, comme dit la chanson. C’est en partie cette même génération qui commencera à se pencher sur les mangas traditionnels et fera le trajet inverse de l’écran au papier. Bientôt, cette mangamania gagnera aussi les générations suivantes.

De nos jours, le manga est bien implanté en France et rallie des centaines de milliers de fans sinon plus. Côté, BD, il se vend un nombre vertigineux d’albums chaque année. On peut aussi prendre comme indicateur symbolique ce cet engouement la Japan Expo de Paris. Sur la seule année 2019 et pendant 4 jours, ce salon qui célèbre les mangas, les animes, les jeux vidéo et la pop culture japonaise a réuni plus de 250 000 visiteurs. Quant aux autres salons sur le même thème sur le sol français, ils font le plein, à chaque fois, avec des dizaines de milliers de visiteurs.